Pablo Correa, 30 ans d’amour rouge et blanc : l’homme qui a façonné l’ASNL

En 1995, un jeune attaquant uruguayen, inconnu du grand public, posait ses valises à Nancy. Trente ans plus tard, Pablo Correa est toujours là. L’homme est devenu plus qu’un entraîneur, plus qu’un joueur passé par le club : il est l’un des piliers de l’identité de l’ASNL. À l’heure où le football se transforme à grande vitesse, où la fidélité devient rare, l’histoire qui lie Pablo Correa à Nancy, à son club, à sa ville, relève de l’exception. Une histoire faite de victoires, de larmes, de départs et de retours, mais surtout de passion constante.

Attaquant discret mais efficace, il dispute 138 matchs sous les couleurs de l’ASNL, inscrivant 32 buts entre 1995 et 2000. Un bilan honorable pour ce joueur au jeu altruiste, plus porté sur le collectif que sur les statistiques personnelles.

Mais déjà, l’Uruguayen laisse entrevoir une qualité rare : une lecture du jeu fine et une intelligence tactique naturelle. Des qualités qui, aux yeux des dirigeants nancéiens, en font un futur entraîneur en puissance. Lorsqu’il met fin à sa carrière de joueur en 2000, c’est tout naturellement qu’il reste au club, d’abord dans l’encadrement du centre de formation. Une deuxième vie commence, et elle sera encore plus marquante que la première.

L’entraîneur visionnaire

En 2002, un événement change le destin de l’ASNL : Pablo Correa est nommé entraîneur de l’équipe première. Le club végète alors en Ligue 2, lorgnant dangereusement sur une descente en National 1 (NDLR l'équipe était dirigée par Moussa Bezaz à cette époque) et cherche une nouvelle dynamique. En trois saisons, le technicien uruguayen réussit l’impensable : il fait remonter Nancy en Ligue 1, à l’issue de la saison 2004-2005. Une montée bâtie autour d’un jeu collectif rigoureux, d’une défense solide et de jeunes joueurs prometteurs.

Mais c’est en 2006 que Pablo Correa entre définitivement dans l’histoire du club. Le 22 avril, au Stade de France, l’ASNL remporte la Coupe de la Ligue face à Nice (2-1). Un trophée majeur, le premier depuis 1978. Nancy célèbre, la place Stanislas vibre, Correa devient un héros. Sous sa houlette, le club connaît ensuite plusieurs saisons de stabilité en Ligue 1..

Le style Correa ? Une exigence quotidienne, un discours franc, et une fidélité à un système de valeurs. Il valorise les jeunes, s’adapte à son effectif, refuse le bling-bling. Son Nancy est une équipe à son image : humble, combative, efficace.

L’homme des retours

En 2011, après neuf saisons à la tête de l’équipe, Pablo Correa quitte le club. Une page se tourne. Mais pas pour longtemps. En 2013, il revient, une première fois. Puis une deuxième fois, dix ans plus tard, en 2023. Ces retours successifs sont autant de preuves du lien indéfectible qu’il entretient avec l’ASNL.

Pourquoi revient-il toujours ? "Parce que c’est chez moi", répond-il simplement. Pablo Correa n’est pas un technicien de passage. Il ne vient pas signer un contrat, il vient prendre soin d’un club qu’il aime. Et lorsque l’ASNL traverse des moments difficiles, c’est souvent vers lui qu’on se tourne.

Le football moderne ne connaît guère d’exemples comparables. Trente ans passés dans la même ville, à aimer le même club, avec trois passages en tant qu’entraîneur principal, cela relève de l’exceptionnel. Et cela en dit long sur l’homme autant que sur le professionnel.

2025 : l’année du renouveau

Son retour en 2023 n’est pas anodin. L’ASNL évolue alors en National 1, dans une période de reconstruction, de doutes aussi. Le club a connu des descentes, des remous en coulisses, des désillusions sportives. Mais Pablo Correa revient avec sa sérénité légendaire et son projet de jeu clair.

Deux ans plus tard, l’objectif est atteint : l’ASNL est sacrée championne de National 1 et retrouve la Ligue 2. Un titre obtenu dans un stade Marcel Picot plein à craquer face à Nîmes, un soir de mai 2025, puis célébré face à Rouen. Et une communion immense avec les supporters, réunis le lendemain sur la place Stanislas pour célébrer ce retour parmi le monde professionnel.

Pablo Correa ne s’emballe pas. Fidèle à lui-même, il préfère parler de travail, d’équilibre, de collectif. "Ce n’est pas ma montée, c’est celle d’un groupe, d’un club, d’une ville", répète-t-il. Mais tous ceux qui suivent l’ASNL savent que son empreinte est partout : dans l’attitude des joueurs, dans la gestion du vestiaire, dans les résultats.

Un monument du club

À force de patience, de rigueur et d’humanité, Pablo Correa s’est forgé une place unique dans l’histoire de l’AS Nancy Lorraine. Avec plus de 600 matchs dirigés sur le banc nancéien, il est l’entraîneur le plus capé du club. Il est aussi, avec Michel Platini, l’une des figures tutélaires du club.

Mais ce que Correa incarne va au-delà des statistiques. Il représente une certaine idée du football. Celle du lien entre un club et son territoire. Celle du respect du maillot. Celle de la fidélité, dans un univers qui l’oublie trop souvent.

Les supporters ne s’y trompent pas. En tribunes, on chante son nom. On salue sa simplicité, sa proximité. Il ne joue pas à la star. Il reste accessible, sincère, profondément attaché aux couleurs rouge et blanche.

Et maintenant ?

Pablo Correa aborde cette nouvelle saison en Ligue 2 avec ambition mais sans précipitation. Il sait que la reconstruction est un processus long, qu’il faut stabiliser le club avant de rêver plus haut. Mais il sait aussi que cette montée peut marquer le début d’un nouveau cycle.

Et lui ? Il ne parle pas de fin pour le moment. À 58 ans, il est encore animé par la même passion. Son discours reste lucide, mesuré, mais on devine dans ses yeux le plaisir intact d’être là, sur le banc, à défendre les couleurs du club qu’il aime.

Une histoire d’amour rare

Trente ans après son arrivée, Pablo Correa est plus qu’un acteur de l’histoire de l’ASNL : il en est un bâtisseur. De joueur à entraîneur, de mentor à repère, il aura traversé toutes les époques du club moderne. Avec une fidélité, une classe et une constance admirables.

Dans un monde du football où tout va trop vite, où les entraîneurs changent au rythme des saisons, Pablo Correa reste une exception. Une ancre. Une légende vivante. Et tant qu’il sera là, Nancy saura qu’elle peut croire en son destin.

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Juliette Schang

Administration

Rédactrice en chef FansOfNancy